Bien évidemment, le mieux est de disposer d’un orgue à tuyaux à accès illimité, bien entretenu, avec un bon toucher mécanique, bien juste et possédant au minimum 2 claviers (de 56 touches ou plus) et un pédalier (de 30 ou 32 touches).
L’idéal est d’ailleurs de pouvoir jouer régulièrement sur plusieurs orgues d’esthétiques diverses, de tailles diverses, d’époques diverses, et tant qu’à faire avec des accessoires différents (cuillères de combinaisons, combinateur, séries de tirasses et accouplements, boîte(s) expressive(s), accouplements à tiroir, …) afin de pouvoir travailler l’essentiel des difficultés de base. Le tout dans un environnement agréable (bon éclairage, banc réglable, belle acoustique, chauffage l’hiver et silence environnant toute l’année, etc.) et… sans bourse délier.
Autant dire tout de suite que tout cela est impossible et qu’il va falloir se contenter de minimiser les inconvénients ! Voici plusieurs solutions (partielles) :
- Disposer d’un orgue à tuyaux et mécanique chez soi. L’avantage est que l’environnement de travail est bon et que le toucher, en général sensible sur un petit instrument d’étude, permet de se construire une belle main de claveciniste. L’inconvénient est que c’est souvent cher, cela prend de la place, les voisins se plaindront d’entendre des ronflements (un piano est davantage bruyant en général mais un orgue à tuyaux bourdonne au loin) et à moins de disposer d’un gros budget, l’instrument aura peu de jeux, peu de claviers et donc en général pas d’accessoires d’accouplements. On y travaillera excellemment la musique ancienne (ce qui est fondamental) mais la musique romantique ou contemporaine y sera à l’étroit : impossible de travailler les gestes de « pâte sonore », et encore moins les changements de claviers ni surtout les changements de jeux. Et bien sûr, impossible de s’entraîner à faire de la registration. C’est tout de même une très bonne solution parce que l’organiste doit justement savoir jouer sur un petit modèle pour ajuster son travail des doigts, ainsi que la coordination mains/pieds, et ne pas se précipiter trop vite pour les choix de sonorités, qui arrivent bien après le travail de base.
- Disposer d’un accès à un orgue mécanique d’église. S’il est petit, retour au paragraphe précédent (mais avec probablement quelques inconvénients supplémentaires dus à l’environnement…). S’il est gros, parfait pour s’entraîner à registrer, à changer les jeux tout seul, à utiliser les accessoires disponibles, etc. Bien sûr, chaque orgue ayant ses caractéristiques, ce travail sera toujours incomplet. En revanche, pour le travail de base, attention : on ne travaille pas sur un orgue important, il n’est pas fait pour cela. Outre le fait qu’un gros instrument s’use considérablement quand on s’en sert (toute la mécanique, du fait des grandes longueurs, subit des tensions et des frottements bien plus importants que les petits instruments), il n’est pas bon d’y étudier ses partitions : on se régale à registrer, on entend beaucoup moins de détails, on se fait illusion à soi-même. Bref, on s’amuse, on triche, et on ne progresse pas. A réserver lorsque l’on sait son texte !
- Concernant les orgues électriques à tuyaux (chez soi ou ailleurs), le toucher est tout sauf pédagogique. C’est mieux que rien, mais un petit orgue mécanique sera toujours bien meilleur qu’un gros électrique. Là encore, c’est bien pour travailler le son, pas du tout pour travailler la main.
- Ne pas négliger le PIANO. Bien sûr, un orgue est indispensable pour travailler le jeu de pédale. Mais on peut travailler tout le reste au piano, le toucher est sûrement le meilleur qui soit (ni trop léger, ni trop lourd : un excellent intermédiaire pour ensuite savoir s’adapter rapidement à tout type de clavier d’orgue) et rien ne vous empêche de chanter la partie de pédale tout en jouant les mains, c’est excellent pour vérifier que votre cerveau pilote bien le tout ; passer ensuite sur un pédalier sera grandement facilité.
Les avantages du piano sont multiples :
– Une main de pianiste est la plus apte à aborder tous les répertoires, de plus tous les doigts sont obligés d’être également forts sinon le résultat sonore est bancal. Un orgue est plus tolérant et la main peut devenir paresseuse…
– Le piano est un instrument dynamique : les effets de nuances s’entendent, et on pourra donc faire des crescendi, decrescendi, notes mises en valeur, etc. Quel intérêt puisqu’on ne pourra pas le reproduire à l’orgue ? Je vous assure que si : pour commencer, cela donne des idées d’interprétation (le piano « répond » et donc inspire), et ensuite, une fois que l’on sait ce que l’on veut entendre, on va « jouer avec l’orgue » pour reproduire ce que l’on aura bâti au piano, et c’est tout à fait possible. Bien sûr, autrement. La technique organistique utilise d’autres moyens, dont… un peu de triche acoustique. Mais ça marche ! Alors aucune hésitation à travailler au piano. On peut y faire les trois quarts du travail de base.
– Tout le monde a un piano chez soi, enfin peut-être pas tout le monde, mais au moins un modèle électronique… ? C’est un instrument très démocratisé et pas forcément cher à l’achat. Il y a d’ailleurs un important marché de l’occasion.
– Ah, un piano électronique alors ? C’est moins bien qu’un piano acoustique évidemment. Mais les avantages cités ci-dessus perdurent au moins partiellement. Et il y a même un avantage supplémentaire possible concernant le pédalier. Voir ci-dessous :
- De même que les anciens travaillaient leur orgue chez eux sur des clavecins équipés de pédaliers (ce qui évitait en plus de devoir payer un pompeur pour jouer sur l’orgue de l’église), le 19ème siècle a inventé le piano-pédalier pour les organistes. Il n’y en a quasiment plus aucun mais on peut en reconstituer avec des pédaliers électroniques : soit on adapte un pédalier d’orgue (d’occasion, cela suffit) sur un piano électronique, soit on adapte un pédalier à un expendeur (générateur de sons de piano) et on raccorde le tout à un piano acoustique pour travailler la partie de pédalier. Solution peu onéreuse, pas bruyante, peu encombrante (on peut relever le pédalier quand on a fini de jouer), et les mains gardent un bon toucher de piano.
Pourquoi pas un expendeur de sons d’orgue ? D’abord, pour disposer des mêmes timbres aux mains et aux pieds (les autres sonorités parfois fournies sur les pianos électroniques sont souvent horribles et de toute façon moins dynamiques que la percussion du son du piano), mais surtout parce que les harmoniques de piano sont si riches qu’un seul son par note suffit pour donner la profondeur du 16′ + 8′).
Dénichez :
- soit un pédalier d’occasion (on en trouve sur les sites de ventes entre particuliers),
- soit un pédalier + un expendeur de sons de piano de qualité de base (le moins cher possible, on ne se servira que des basses) si vous avez un piano acoustique,
et écrivez-moi (page contact) pour que je vous explique la marche à suivre pour disposer d’un kit de connexion adapté à votre modèle de pédalier (selon s’il dispose déjà de connectiques ou pas) et celui de votre piano électronique. Mes élèves qui en sont dotés sont ravis de pouvoir travailler correctement chez eux l’intégralité de leur répertoire, sans se ruiner, sans prendre beaucoup de place au sol et sans déranger personne.
Vous pouvez également consulter l’excellent site https://midifier.pagespro-orange.fr/index.html qui propose pléthore des solutions !
- Et l’orgue électronique alors ? Pourquoi pas si vous avez un piano à côté, auquel cas, pas besoin du kit pour piano-pédalier. Mais ne travaillez pas seulement sur ces ersatz, vous ne pourriez pas garder (et encore moins construire) une « bonne main ». Le seul avantage que j’y vois, c’est que ceux qui ont l’oreille absolue pourront s’entraîner à jouer avec des diapasons décalés…